On connaît de Marcel Proust sa puissance évocatrice, sa capacité prodigieuse d’observation, son souci du détail, son art judicieux pour trouver le mot le plus précis, le plus parlant pour vous faire percevoir une odeur, une couleur ou un sentiment.
Ce style de livre n’est pourtant pas du goût de tous.
Il demande une certaine dose d’imagination et de poésie qui n’est l’apanage que de quelques-uns.
Jacques Sereys, dans un seul en scène, nous le fait découvrir tout autrement.
Il nous propose de vivre le texte Du côté de chez Swann et nous le transforme en une sorte de conte magique. Avec pour seul décor quelques pages d’écriture, des voilages et des cubes de bois, il nous transporte dans son petit village de Combray, pendant ses vacances.
Les personnages, déjà délicieusement croqués par Proust, prennent corps et vie.
Ils nous entraînent entre les touches bleues et blanches des lilas, nous prennent par la main pour nous faire découvrir le jardin aux couleurs pastel du temps jadis.
Son visage s’illumine et il devient le petit garçon en balade, au bord de la Vivonne.
D’un changement de voix, il devient Mme Verdurin, Françoise, sa tante Léonie ou sa mère, d’un geste il adopte une mimique, il décrit une impression.
Sans forcer, avec une aisance et un naturel stupéfiant, il transforme le roman en un petit bijou.
L’écouter est un régal.
Plus jamais, l’univers proustien ne pourra être décris comme fade ou mièvre, il prend ici une exquise grâce surannée.
Ce n’est pas Jacques Sereys qui boit la tasse de thé, mais bien le public qui la déguste et la savoure à petites gorgées, la bouche remplie de l’odeur délicate des madeleines si chères à Marcel Proust.
Jacques Sereys a reçu pour ce rôle le Molière 2006 du meilleur comédien.
Muriel Hublet
Spectacle vu le 07-03-2007
Atelier Théâtre Jean Vilar
Présentation du spectacle :
Résumé :
Seul en scène, Jacques Sereys vous convie à une promenade enchantée dans les jardins du temps perdu. Tel un orfèvre se penchant sur la formidable horlogerie du souvenir, il réveille avec délicatesse un monde qui n’est plus. Et si vous pensez encore que l’univers de Proust est rasoir ou alambiqué, le comédien, sociétaire honoraire de la Comédie-Française, vous prouvera le contraire et convertira même les plus rétifs, grâce à sa passion pour l’œuvre de l’auteur.