C’est à moi !
Bertolt Brecht titille, triture et asticote le sentiment de propriété dans Le Cercle de craie caucasien.
Il ébauche à grands traits son raisonnement dans une traction politique entre deux kolkhozes se disputent une vallée.
L’honneur est sauf, un compromis est trouvé.
Pour fêter cela les différents représentants sont invités à prendre par à un spectacle qui les plongera dans une légende chinoise qui ressemble par le sens fortement au jugement de Salomon.
Si Qui prime entre le sang et l’amour, entre la possession et l’usage ? est bien la question la plus évidente posée par Brecht.
De-ci delà, une seconde se profile qui interpelle sur le sens des responsabilités, les lâchetés et l’engagement politique des uns et des autres en période de conflit.
Le Cercle de craie caucasien est loin d’être une prise de tête.
Bien au contraire !
Si son résumé est assez aisé à rédiger, en rendre les impressions s’avère plus complexe tant la mise en scène de Jasmina Douieb, les costumes, masques et marionnettes de Natacha Belova (L’Ecole des ventriloques) et la scénographie de Xavier Rijs chatouillent sans cesse les esprits en proposant des tableaux originaux et surtout sans cesse renouvelés.
Sept acteurs (Jean-Michel Distexhe, Cédric Eeckhout, Cathy Grosjean, Lara Hubinont, François Neycken, Benoît Van Dorslaer et Cécile Vangrieken) composent la distribution et endossent une quarantaine de rôles.
Pour réussir ce tour de force visuel et permettre au public d’identifier et de différencier clairement chacun, ils enfilent des demi masques, des accessoires (moustaches, chapeaux, …), des éléments de costumes ou encore des corsets rigides ou encore se glissent les mains dans des marionnettes pour se dédoubler ou deviennent le temps d’une scène un enfant par la magie des poupées.
Cette myriade d’images et toute cette inventivité ne font à aucun moment too much ou kitch, tout a été soigneusement mesuré et dosé pour donner une touche inédite qui devient une astucieuse et passionnante adaptation qui soulignent à merveille les propos de Brecht.
Un travail superbement séduisant qui permet au ZUT (et à la Cie entre Chiens et Loups) de renouer avec le Théâtre (avec un grand T) astucieux, créatif, fantaisiste et intelligent.
Muriel Hublet |