Le star-system un bourreau aux victimes consentantes ?
Etre star …
Un rêve inaccessible ? Une gloire incroyable ? La vie idéale et sans contraintes ?
Un drame intime ? Une série de renoncements ? Une remise en question permanente ? Une lutte de tous les instants ?
T’appartenir plonge dans l’intimité d’une star déchue, d’une has been qui fait son grand come-back.
Pourquoi être partie ? Pourquoi ce retour ?
Les questions des médias affluent. La star doit se plier à leurs exigences d’autant que désormais face à l’influence grandissante des promos, tournées, passages en radios, interviews télévisés, participation aux reality-shows sont devenir obligatoires, obligés, nécessaires pour exister, pour ne pas retomber dans l’anonymat, pour continuer à exister tout simplement.
Dans une scénographie de Claude Enuset (qui réalise la mise en scène et cosigne également le texte avec Stéphanie Blanchoud), tout à la fois sobre et qui permet de voyager entre un plateau de télévision, une loge, un restaurant ou un intérieur cosy, Gloria (Martine Willequet) évolue entre peurs et confidences. Elle évoque son passé à une jeune journaliste engagée pour écrire sa biographie.
Entre pudeur, secrets, aveux, hésitations, petit à petit, la star va se dévoiler, parler d’elle, de son passé, de son mentor-mari, de son train de vie, de son deuil, de son alcoolisme, de sa déchéance, de sa ruine et de son come-back.
Ses confidences vont s’émailler de chansons créées pour l’occasion par Martine Kivits et Jean-Luc Fafchamps et qui fleurent bon les nostalgiques seventies, et d’extraits audio d’interventions de journalistes et commentateurs.
Ces derniers sont l’occasion d’éclairer le public sur certains faits passés sous silence ou simplement effleurés par Gloria dans son récit.
Face à elle, pour réaliser ce livre, pour transcender les mots de la diva une jeune femme bougonne (Stéphanie Blanchoud), limite agressive, chargée de faire de ces bribes hétéroclites de confidences un bouquin intéressant pour un public de plus en plus intéressé par des aveux sensationnalistes, des coucheries et autres cochonneries.
Elle cache les cicatrices d’un passé douloureux qui va rejaillir sur sa relation avec la chanteuse sur le retour.
Le récit séduit par sa douceur, sa fragilité, sa peinture sans concession et sans strass du star-system.
L’interprétation de Martine Willquet est impeccable de justesse, dans ce rôle à multiples facettes. Elle est Gloria tout simplement, traînant dans son sillage délicatement parfumé une aura de mystère, des regards tout à la fois tendres, coquins et complices.
A l’opposé, la presque brusquerie, le ton monocorde par instants, le phrasé haché, voire précipité de Stéphanie Blanchoud irritent un peu. S’ils peuvent se justifier par le sens du spectacle et son rôle de taciturne, au caractère renfrogné et à son mutisme forcé par un lourd secret, ils semblent quand même exagérés puisqu’ils nuisent à la bonne perception du texte.
Certaines tirades notamment quand la jeune femme relit le texte déjà rédigé sont jetées tellement vite qu’on ne sait en apprécier toute la portée, la poésie et la beauté.
Dernier reproche peut-être encore à faire est cette multitude de références faites à l’auteur Christian Bobin, les tirades dites à la six-quatre-deux qui semblent sortir d’un de ses livres alors que beaucoup semblent même ignorer le nom de cet écrivain.
Dommage donc que ce déséquilibre nuise à l’ensemble et estompe tout à fait le travail de Martine Willquet qui ne démérite en rien et risque malheureusement et injustement, aux yeux de certains, d’être amalgamée dans ce T’appartenir un peu décevant.
Muriel Hublet
Spectacle vu le 26-02-2008
Théâtre Le Public
Présentation du spectacle :
Résumé :
« T'appartenir », était le titre de son premier succès. Elle a connu la gloire dans les années 80 ; des années de démesure, d'exubérance et de... décadence. Un jour, tout s'arrête, le vide. Aujourd'hui, vingt ans après, elle fait son « come back ». Un retour en beauté, comme il se doit. En haut de l'affiche. Avec chansons, bagages et mémoires. Et toujours l'amour de la musique, le besoin de la scène, les éclats, les caprices et aussi, le poids du passé.
L'affiche :
de Stéphanie Blanchoud et Claude Enuset Musique originale et arrangements : Martine Kivits et Jean Luc Fafchamps