Un uppercut en plein cœur à recevoir de toute urgence.
Théâtre vérité et cri de révolte, L’initiatrice dénonce une des hontes de l’Afrique : l’excision des femmes.
Deux millions de petites filles subissent chaque année le fil de la lame de rasoir ou d’un tesson de bouteille, soit près de 5400 par jour !
Des enfants sont mutilées, lacérées à vif, au mépris de tous les risques et tous les dangers, pour respecter une barbare tradition séculaire et contrairement à ce que nos bonnes consciences voudraient croire pas rien qu’en Afrique.
Drame de la féminité, rite de passage sanglant et mortel, l’excision est un sujet éminemment féminin, écrit, décrit, dénoncé par un homme, Pietro Pizzuti.
D’une thématique violente sur les mutilations sexuelles, il crée une sorte de bulle poétique où martyre, détresse, honte, amour, horreur, peur et révolte s’expriment simplement, avec beaucoup de force, de tendresse et d’humour et … d’intensité.
Sur scène, deux femmes, deux passés, deux douleurs, deux histoires vont se rencontrer et s’apprivoiser.
Adama, la noire (Babetida Sadjo) a fui l’Afrique intacte ;
Enceinte, elle trouve refuge chez la blanche (Florence Crick), l’européenne qui a aidé sa mère l’exciseuse, en apportant hygiène et asepsie dans une pratique souvent rudimentaire et en tentant lentement de modifier les mentalités, là où toute répression est vaine.
Mais au-delà de la puissance des mots, de leur force évocatrice, derrière leur poignante sensualité, derrière la profonde détresse et l’atroce cruauté qu’ils décrivent, on retiendra tout particulièrement l’intense interprétation de Babetida Sadjo.
La jeune comédienne joue, vit et fait percevoir à merveille ce déchirement du corps et de l’âme, cette quête éperdue d’une réponse, d’une identité, d’une sexualité librement vécue et acceptée.
Il serait pourtant injuste de s’arrêter au texte ou au jeu de Babetida Sadjo.
La fragilité et la grâce de Florence Crick, la mise en scène de Guy Theunissen légère et recherchée et les éclairages de Laurent Kaye (tout en clairs-obscurs) amplifient le tout et font comme voler sur la salle comme un voile soyeux, pudique et subtil qui étreint, oppresse, captive et séduit.
Certains tableaux en deviennent de véritables petits bijoux telle l’évocation des premiers émois amoureux d’Adama.
L’initiatrice est à coup sûr un des immanquables de ce début de saison et ne pourra que vous aussi vous subjuguer, vous attendrir et à vous conscientiser à nouveau sur une des tragédies dont sont encore victimes les femmes.
Un uppercut en plein cœur à recevoir de toute urgence et à … méditer.
Muriel Hublet |