Dans les coulisses de Patrick Ridremont
Iconoclaste, l’humoriste comédien, le pro de l’impro, le présentateur de télé nous a habitués à bien des frasques et des libertés.
Cette fois pourtant, à lire le titre de son seul en scène, on pense, il ose.
Il déboule avec un intitulé provocateur, histoire de titiller la curiosité.
Jadis l’émission le Petit Rapporteur avec Daniel Prévost nous avait déjà emmenés à sa découverte.
Où nous entraîne donc Patrick Ridremont ?
Tout simplement dans un voyage initiatique, par les chemins détournés du rire, dans le monde de la provocation et de la prise de conscience.
Il espère de la part des spectateurs un acte lucide et volontaire, une audace intellectuelle, l’acceptation tacite de se laisser bousculer dans son confortable ronron de public.
De jeux de mots sur le titre de son spectacle à la meilleure manière de tout dire (ou d’avoir le droit de le faire), il décontracte l’assistance, il convainc si on peut rire de tout (ou presque), cela doit être fait sans vraiment de méchanceté, avec un respect amusé, juste en retournant une situation pour en révéler l’ironie par la mise en lumière de contrastes.
Il l’avouera ensuite, si le concept du one man show le titillait depuis longtemps, il n’avait pas dénicher son sujet idéal, ni quelles idées exploiter.
Cette fois, c’est fait, il saute le pas, il entre seul sur scène pour une heure trente d’effronteries délicieusement irrévérencieuses et pourtant frappées au coin de l’évidence.
Quel meilleur thème pour un élève de l’IAD (Institut des Arts de Diffusion), un comédien qui hante les planches du Théâtre Jean Vilar ou Théâtre de La Valette (les seuls encore à accueillir celui que d’autres considèrent -trop facilement ?- affublé d’une voyante étiquette Made in Télé) que de parler du théâtre.
Il va donc évoquer, en long, en large, et surtout en travers, son petit monde, son quotidien, cet inconnu qui nous fascine, intrigue et séduit.
Lucide, critique, pertinent, cynique, sans méchanceté aucune pourtant, il trace quelques portraits ironiques et intelligents.
Le jeune figurant, ferraillant allègrement de son épée en plastique, pour compenser ses trois maigres répliques par une ardeur ébouriffante à faire maints moulinets assassins… dans les coulisses.
L’acteur qui veut en faire trop, à genoux, se roulant par terre, …
L’auteur trahi par un metteur en scène nombriliste, …
Il a été chacun d’eux, il ne se moque pas, il transmet tout bonnement et ironiquement un certain vécu.
Inutile donc de tenter de lui attribuer la moindre amertume ou d’imaginer un vilain règlement de compte.
Ridremont s’amuse tout simplement à démystifier, par des effets visuels (telle l’imaginative aventure de la tente) ou quelques mots bien sentis, le théâtre, ses errances et ses réussites.
Le public, chaque fois qu’il se glisse dans une salle noire, sur son strapontin (pas forcément confortable), impatient de voir le rideau rouge se lever (si, si, cela existe encore par endroits) est-il toujours conscient de la réalité humaine des coulisses et de ce que deviennent Hamlet et le Cid une fois démaquillés et les spots éteints ?
La fin du spectacle lui permettra de le faire découvrir dans une vision d’anthologie d’un acteur indépendant aux prises avec son contrôleur fiscal.
S’il termine sur une tirade grandiloquente et la gueule (volontairement) enfarinée, il n’a pourtant aucune crainte avoir, le public est séduit et ravi.
Patrick Ridremont a gagné son pari intime.
Sans utiliser les usées ficelles des têtes de Turc et autres dérives sur la politique, il s’est créé un one man show unique, personnel, subtil, spirituel malicieux et pétillant.
Muriel Hublet
Spectacle vu le 16-08-2008
Festival Royal de Théâtre de Spa
Présentation du spectacle :
Résumé :
Aussi étrange que cela puisse paraître, le spectacle s'appelle Mon Cul, alors qu'il n'en sera jamais question. Ce titre gentiment subversif a pour but de rappeler aux spectateurs qu'aller au théâtre n'est pas un acte passif et anodin. Il faut, en effet, du cran pour appeler le bureau de location et acheter une place pour voir Mon Cul.