Michel Huisman, directeur de Télé Bruxelles, de 1996 à 2006, croque et dégomme, dans son texte Intox, un univers qu’il connaît bien.
Il en situe l’action dans une station de télévision, en pleine crise de succession directoriale.
Guy Pion y est le directeur de la chaîne à l’aube de la retraite.
Face à lui Laurence d'Amelio, sa belle-fille et directrice de l’information et Serge Demoulin, journaliste vedette sont au coude à coude pour prendre sa place.
Le vieux briscard des médias va manipuler son entourage pour tenter d’imposer son héritier.
L’arrivée d’un DVD compromettant et remettant en question le scoop d’une télévision concurrente va lui offrir l’occasion idéale de tirer pas mal de ficelles en coulisse.
Entre info et intox, entre authenticité et manipulation, dans une course à l’audimat où tous les coups sont permis, les dés sont pipés.
Vérité ?
Fiabilité ?
Neutralité ?
Impartialité ?
Le cinquième pouvoir et Big Brother ne sont pas loin.
Michel Huisman nous a concocté un récit ambigu et cynique à souhait.
Son intrigue pousse à la réflexion et remet en cause la crédibilité des médias.
Difficile d’accuser ou de distiller le doute sans démontrer, sans étayer solidement son propos.
Les protagonistes d’Intox, pour appuyer leurs thèses (pour ou contre l’utilisation du scoop en leur possession), vont donc faire références (extraits vidéo à l’appui) à toute une série de reportages dénonçant des magouilles télévisuelles (la grippe A-H1N1 estimée comme une pandémie, l’authenticité des charniers de Timisoara, la destruction des couveuses koweïtiennes…).
Pour pertinents que soient ces bouts de films, ils distraient de l’intrigue principale.
Mais leur présence est pourtant bien utile, car pris isolément, le récit paraitrait mince voire insipide.
Si on ajoute à cette ambivalence la mise en scène de Michel Kacenelenbogen comme froide ou distante et des personnages comme caricaturaux, sorte de parfaits clichés d’un milieu affairiste glacé et aseptisé, on pourrait à tort croire Intox bien peu plaisante.
Ce serait dommage de s'arrêter à chaque élément, Intox est un tout si la pièce offre une image décidément bien peu reluisante de la presse, elle invite surtout à la réflexion et à la prise de conscience.
Et ressortir du théâtre en posant un œil différent et plus critique sur les journaux télévisés et leur probité, n'est-ce déjà pas un énorme pas en avant vers la sensibilisation et la conscientisation ?
Muriel Hublet
Spectacle vu le 04-09-2010
Théâtre Le Public
Présentation du spectacle :
Résumé :
On va faire péter l’audimat ! Laisserons-nous l’impartialité de la presse devenir un simple mythe contrôlé par le Big Brother qui surveille tout, et qui dirige les esprits selon ses besoins ? L’information, c’est le pouvoir, ne l’oublions pas. Et ce pouvoir, nous devons nous en servir !