Que peut-il bien se passer dans votre esprit, si un jour tous vos repères s’effritent entre vos doigts ?
La décoration de votre appartement est modifiée.
Vos clés n’ouvrent plus la porte d’entrée.
Vos vêtements sont différents.
Vous possédez un téléphone fonctionnel alors que vous n’avez jamais été abonné à ce boulet sociétal.
On vous harcèle d’appels destinés à un autre.
Et … votre nom sur votre carte d’identité est celui d’un autre !!!
Sébastien Thiéry dans Qui est Monsieur Schmitt ? se joue des certitudes, balaie les conventions pour plonger le spectateur dans une quête identitaire.
Jean-Paul Bélier n’est pas Monsieur Schmitt, enfin peut-être.
Tout est ambivalence, soupçons, incertitudes, contradictions dans ce qui semble être une petite vie bourgeoise banale.
Cauchemar ?
Trouble de la personnalité ?
Envie d’être un autre ?
Burnout inavoué, rejet des contraintes de son existence, besoin d’un souffle d’air nouveau ?
Inutile de chercher une raison, un fil rouge tangible à l’intrigue. Sébastien Thiéry mélange les cartes, les restitue dans un ordre aussi chamboulé que celui de l’esprit de Bélier-Schmitt face à cette situation particulièrement rocambolesque.
Faut-il pour autant déposer votre logique au vestiaire en même temps que votre paletot ?
Peut-être.
La facilité réductrice serait de résumer Qui est Monsieur Schmitt ? à une plaisante comédie loufoque servie par un quatuor de comédiens formidables, mais qui s’essouffle quelque peu vers la fin.
Les amateurs de policiers tortueux, les familiers d’Harold Pinter y trouveront eux une angoisse sous-jacente et quelques graines de tragique derrière les éclats de rire et ne manqueront pas de se refaire mentalement le film de la pièce à la recherche d’autres indices, d’autres réponses.
Car, à l’image du décor de Lionel Lesire qui se déforme au fur et à mesure de la représentation, n’est-ce pas plutôt notre perception qui est altérée ?
Quelle que soit la manière dont le spectateur la ressentira, une unanimité ne peut que se dégager sur le travail rigoureux de mise en scène de Bernard Cogniaux. Tout de long, les familiers de l’artiste retrouveront sa patte, sa gestuelle, sa tendresse et son humour.
Thierry Janssens excelle en flic débonnaire et plutôt borné, Thierry De Coster insuffle à son psychiatre un joli zeste de folie.
Il signe avec Alain Leempoel une scène de baballe particulièrement drolatique. Ce dernier séduit et surprend dans une interprétation du plus haut comique.
Dans son personnage d’hésitant, qui tente de se rattraper à la moindre certitude, d’homme qui masque son désarroi, Alain Leempoel distille la juste dose de clownesque décomplexée et naturelle qui maintient en permanence Bélier-Schmitt en équilibre entre folie et mensonge, entre drôlerie et émotion.
Marie-Paule Kumps nous régale d’un nouveau rôle d’épouse naïve et un chouia cruche
Entre boulevard et absurde, entre comédie et thriller, entre paranoïa et schizophrénie, le Théâtre Royal des Galeries pose une troublante question.
La réponse en est décalée, désopilante et insidieusement perturbante.
Saurez-vous aussi répondre à ceci : Qui est Monsieur Schmitt ?
Muriel Hublet
Spectacle vu le 17-02-2012
Théâtre Royal des Galeries
Présentation du spectacle :
Résumé :
Les époux Bélier dînent dans leur salle à manger quand ils sont interrompus par
la sonnerie du téléphone.
L'affiche :
De Sébastien Thiéry
Avec Alain Leempoel, Marie-Paule Kumps,
Thierry Janssen, Thierry De Coster, Térence Rion