Qui suis-je ? D'où viens-je ? Où vais-je ? Dans quel état j'erre ?
Quatre questions existentielles qui depuis la nuit des temps n’ont cessé de tarauder l’homme.
A sa manière, entre humour et profondeur, entre délicatesse et tendresse, Philippe Vauchel s’en empare, nous livre ses doutes et ses questionnements intimes.
Il débarque parmi le public vêtu d’un anorak orange, un bonnet enfoncé sur la tête, un filet à provision à la main et un précieux harnachement sur le dos.
Entre monologue et dialogue, il se dévoile complice et proche.
Ses mots sont les nôtres, ses interrogations pourraient sortir de notre esprit, ses remarques de nos bouches.
Sans avoir l’air d’y toucher, habilement il met à nu un cœur débordant de vie, d’amour, de questions et d’angoisses.
Il se recadre comme une petite chose fragile, une poussière dans l’immensité de l’univers, entre les morts et les à venir, mais aussi pour certains comme un géant, aux yeux des siens, de ceux qui le voient avec le regard de l’amour.
Pas de prise de tête, pas de douloureuses tensions, mais de petits extraits de vie si semblables aux nôtres, qu’on se sent nous aussi Sherpa, le cœur gros, en train de gravir notre Everest personnel, de suivre notre impossible quête.
Difficile d’insister sur un instant du spectacle plutôt qu’un autre, ce serait le décortiquer, le banaliser, lui retirer sa magie.
Car même si tout ne nous parle pas, si l’espace d’une seconde nous replongeons vers nos propres racines ce n’est ni par ennui, ni par lassitude mais pour mieux respirer, capter, intérioriser l’espèce d’aura paisible et lumineuse, la poésie légère et la complicité étrange qui se tisse entre le public, un formidable Philippe Vauchel et la marionnette si figée et pourtant si vibrante et expressive (jolie création de Bernard Clair, aidés des éclairages de Pascal Géoris).
Un rendez-vous théâtral précieux à ne pas rater, Sherpa est une sorte de pépite d’or brut rugueuse, scintillante et fascinante, qu’on ne peut que regarder encore et encore comme subjugué.
Muriel Hublet |