Deux hommes tout nus
Non le titre n’est pas provocateur !
Pour preuve, le rideau s’ouvre sur deux paires de fesses.
Celles de Maître Alain Kramer, un brillant avocat parisien, sont allongées aux côtés de celles de Nicolas Prioux, son conseiller fiscal.
Un retour de soirée arrosée ?
Une nuit de débauche ?
Mal de crâne garanti au réveil en tout cas, car ni l’un ni l’autre ne se souvient de rien et ne comprend rien à cette situation aussi gênante qu’inexplicable.
D’autant, qu’à les croire, aucun n’a de tendances homosexuelles.
Quand débarque Madame Kramer et qu’elle découvre un préservatif usagé, que lui dire ?
Inévitablement, une seule solution s’offre à eux… Mentir !
Mais qu’inventer quand on ne connaît pas soi-même la vérité ?
Va en découler une suite d’élucubrations, de quiproquos et d'imbroglios rocambolesques, car fine mouche Madame Kramer n’a pas l’intention de gober tout et n’importe quoi.
Comédie légère, Deux hommes tous nus mélange pourtant les genres.
Derrière le florilège de gags qui ne cesse de solliciter nos zygomatiques, l’auteur français Sébastien Thiéry distille un certain malaise.
Si de prime abord le thème semble être l’acceptation de l’homosexualité, on se perd parfois entre les mensonges inventés et la réalité.
Ce flou artistique rend d’ailleurs la fin de la pièce tellement pleine d’interrogations que les esprits cartésiens resteront clairement sur leur faim.
Notre besoin de rire et de nous amuser en cette période de fêtes où l’atmosphère est plutôt plombée par l’actualité nous fera oublier notre logique légendaire et certaines lourdeurs du texte pour ne retenir que l’investissement des comédiens.
Dirigés efficacement par Alain Leempoel, ils donnent une solide épaisseur aux personnages.
Michel Kacenelenbogen manipule la dissimulation et esquive les chausse-trappes avec toute l’emphase d’un avocat en train de faire des effets de manche pour convaincre un jury. Arrogant et vaniteux, il évite l’écueil du cabotinage par la drôlerie de ses mimiques et le pathétique ambigu de sa situation.
Nicolas Buysse affronte avec finesse et une délicieuse fragilité toute la complexité et le troublant de cette relation perturbante et aussi inexplicable qu’inexpliquée.
Isabelle Paternotte excelle en femme bafouée, mais qui veut comprendre les raisons de l’égarement de son mari, voire l’aider à l’accepter.
Laetitia Salsano, la call-girl sensée être un témoin de normalité complète cette distribution complice et énergique qui entraîne à un rythme soutenu le public dans ce vaudeville qui déshabille (au propre comme au figuré) le classique triangle mari-femme-amant.
Spectacle vu le 24-11-2015
Lieu :
Théâtre Le Public - Voûtes
Une critique signée
Muriel Hublet
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