Un Fils de notre temps
Je reviens de loin …
Ainsi commence le récit d’une vie, celle d’Un fils de notre temps.
Une racaille arabe, exubérante, provocatrice et pleine de morgue raconte ce qui l’a menée de Bruxelles en Syrie, qui a fait de lui un combattant engagé marqué au fer rouge des ‘istes’ de nos a priori.
Terroriste, islamiste, intégriste, djihadiste…
Autant d’étiquettes, autant de préjugés qui, agités comme des épouvantails, traumatisent l’opinion publique.
À l’écriture et à la mise en scène, Hamadi nous décrit le parcours d’un gamin issu de celles que nous appelons pudiquement nos minorités culturelles.
Il n’a pas choisi d’être ici.
Sans racines ni repères, il est forcé de s’intégrer.
Sans références, sans acceptation véritable, où est la place de ce lettré sensible, sorti d’une bonne école, avec un solide diplôme en poche, contraint de travailler comme bagagiste à Zaventem ?
Dévoré par l’injustice, le sentiment d’être incompris, d’être un paria, cette personnalité tiraillée, révoltée, simplement à la recherche d’une once d’attention.
Elle lui viendra d’activistes fanatisés, et même si sa raison lui crie casse-cou, lui fait prendre conscience des contradictions sous-jacentes, il se laisse convaincre.
Il part.
Il suit une filière…
Camp d’entraînement au Yémen, combat en Syrie.
De retour en Belgique, il est arrêté et dans le cadre d’une procédure accélérée tente d’expliquer ce qui l’a conduit à ce choix.
Seul en scène, Marwane El Boubsi, dans une prestation ébouriffante, endosse tous les rôles tout en jouant la dualité du jeune homme.
Dans une jouissive caricature (un peu excessive, voire tirée en longueur), ilexplore quelques-uns de nos préjugés :la rigidité de la justice, l’obscurantisme policier, l’incohérence politique, l’injustice sociale, le délit de sale gueule, l’opportunisme manipulateur des médias …
Empreint d’un gravissime réalisme, doublé d’un solide sens de l’observation et de réflexion, il relève les contradictions et aberrations des extrémismes et des radicalismes de tous bords.
Si l’on apprécie le ton caustique de la pièce et l’énergie généreuse du comédien, on s’égare parfois un propos trop nerveux, voire presque speedé.
Spectacle vu le 20-10-2015
Lieu :
Centre Culturel des Riches-Claires
Une critique signée
Muriel Hublet
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