Page Blanche
Treize à la douzaine
Les affres du déménagement, nous connaissons tous.
Les caisses dans tous les coins, les objets égarés, les copains qui viennent aider (même ceux qu’on n’avait pas vraiment envie de voir) l’élévateur qui est en retard, l’ascenseur qui tombe justement en panne aujourd’hui, …
En plus de la pression ambiante, Aladin est sur le grill, il doit rentrer son travail de fin d’année, un scénario complet et là, horreur, catastrophe, en plus d’égarer son pc portable, c’est le trou, la panne d’inspiration, l’effroyable … la Page Blanche.
Ils sont sept à entrer et sortir, dans ce petit lieu exigu, chacun avec son caractère, ses envies et ses frustrations.
Et si cette histoire loufoque, cette journée de galère servait de base à ce fameux script ?
Dominique Breda et Alexis Goslain, les auteurs et metteurs en scène nous proposent donc un spectacle qui mélange allègrement un canevas classique avec des fantasmagories d’inspiration cinématographique, à chaque fois qu’une idée d’un scénario possible effleurera Aladin.
C’est ainsi qu’au fil de l’histoire nous plongerons dans un drame très dardennien, un film des années 30 avec une gouailleuse digne d’Arletty, une pantomime aphrodisiaque qu’on pourrait appeler Triangle sensuel à Paris, un audacieux mélange de Massacre à la tronçonneuse saveur proustienne, …
Des intermèdes chaque fois surprenants, amusants et bien imaginés.
Si l’humour est bien présent quasi en permanence, s’il est le propre de l’homme, il est très différent de l’un à l’autre.
Il serait donc injuste de qualifier le spectacle d’irrégulier ou en dents de scie, parce que tout le monde ne rira pas de tout, c’est surtout une question de goût et à coup sûr de compréhension.
Car à ce niveau, il faut bien s’accrocher.
C’est à un rythme endiablé, avec une générosité nettement supérieure aux treize à la douzaine ou mieux encore aux 2+1 gratuit habituellement offerts, que les gags visuels, les contrepèteries, les jeux de mots, les lapsus naturellement malencontreux, les regards très équivoques, les gestes inopportunément ratés et les non-sens, s’empilent, s’amassent et s’entassent plus vite que jamais n’arriveront les fichues caisses de ce satané déménagement.
Parmi les acteurs, il faut observer le jeu d’Odile Ramelot, dans le rôle de Sigrid, la sœur coincée.
Cette jeune comédienne ne se départit un instant de ses mimiques, la tête rentrée dans les épaules, le regard éperdu, les bras le long du corps, .. une belle prouesse.
Il faut encore citer Julie Duroisin et Michaël Manconi, qui jouent les deux copains apprentis comédiens dans le fil rouge, mais qui sont aussi les deux acteurs de chaque intermède cinéma.
Ils enchaînent ainsi, sans un instant de répit des rôles très diversifiés.
Si les autres comédiens ne sont pas cités, ils n’en déméritent pas pour autant.
La saison théâtrale 2007-2008 est encore un peu une Page Blanche, elle débute donc ici au Théâtre de la Toison d’Or par une comédie rieuse, piquante, mais pas dépourvue d’une certaine morale qui fait la part belle au théâtre, mais aussi à la musique et à quelques scénographies amusantes et réussies.
Spectacle vu le 15-08-2007
Lieu :
Théâtre de la Toison d'Or
Une critique signée
Muriel Hublet
Imprimer cette page
Enregistrer cette page sous format PDF