Fugueuses
Vivre Libre en road-movie théâtral
Le duo Pierre Palmade et Christophe Duthuron remet le couvert en nous présentant l’alter ego féminin de Pierre et Fils.
Un peu sur le même principe, une dizaine de saynètes se succèdent à un rythme trépidant et laissent percevoir l’évolution psychologique des personnages. Fugueuses a permis à Line Renaud et à Muriel Robin de signer un des beaux succès théâtraux de la dernière saison parisienne.
Proposé le 5 janvier 2009 à la télévision, le spectacle se transformera, dès mars 2009, sous la houlette de Michel Boujenah, en un long métrage.
C’est dire si l’adaptation sur la scène belge se révèle une gageure.
D’autant que le Théâtre de La Flûte Enchantée, non subsidié par la Communauté Française est loin de disposer des mêmes budgets et possibilités d’investir dans une scénographie coûteuse que le célèbre
Théâtre des Variétés.
Jean-Luc Duray, son metteur en scène, a volontairement opté pour une vision minimaliste, qui permet au spectateur de se concentrer sur le texte et le jeu des comédiennes plutôt que de se disperser dans les détails du décor.
Une toile blanche laisse apparaître en ombre chinoise une image qui préfigure le paysage.
Un panneau Stop nous fait faire aussi le pied de grue au bord de la nationale, une fourche nous transporte dans la cour de ferme de Lucien, une croix nous entraîne dans l’enceinte silencieuse d’un cimetière, etc.
Deux cubes de bois deviendront une tombe, une paillasse, un confortable sofa ou un parapet de pont.
Il n’en faut pas plus, à chacun de créer, par le pouvoir de son esprit, les murs de l’étable, la vache Pâquerette, l’odeur d’humus ou les délicats effluves de fumier.
Côté actrices, robe de soirée et robe de nuit s’amusent à nous offrir deux femmes fondamentalement différentes, mais réunies par un but commun … Exister autrement que dans la vie qu’on leur a pré formaté.
Claude, mamie rebelle, fuit la maison de repos où l’a jetée son ingrat de fils. Elle refuse sa vieillesse solitaire entourée de mourants, après une existence tumultueuse et passionnée.
Margot, cinquantenaire coincée, rue dans les brancards pour briser son carcan de mère-épouse, pour avoir enfin l’impression d’exister par elle-même et non plus de vivre par procuration.
Les deux passés, les deux conceptions de vie vont se confronter à une réalité parfois rude.
Mais au final, chacune ne va-t-elle pas acquérir une certaine liberté d’esprit ?
Dans un texte aux propos par instants convenus, Fugueuses est pourtant un joli moment théâtral bourré de tendresse et d’humour à savourer sans modération.
Chantal Pirotte est attendrissante avec ses airs de petite fille paumée, écrasée sous les responsabilités éprouvantes de mère de famille.
Jacqueline Préseau est une vieille dame indigne attachante.
Loin des ados rebelles qui signent leur révolte par la fuite, c’est cette fois des femmes dans la fleur de l’âge qui utilisent la fugue comme moyen et d’expression, mais avec tout l’enthousiasme et la candeur d’une jeunesse à peine défraîchis par les ans.
Ces deux écorchées solitaires vont s’unir pour faire ensemble les quatre cents coups qu’autrement aucune d’elle n’aurait imaginés même en rêve.
Entre émotions, rires et moments cocasses la pièce nous offre une elle dose de joie de vivre et d’optimisme.
Et par les temps qui courent, voilà un cadeau bien précieux.
Spectacle vu le 07-02-2009
Lieu :
Théâtre de la Flûte Enchantée
Une critique signée
Muriel Hublet
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