Happy Family
Saga familiale par excellence, Happy family est une chronique douce amère du jeune auteur Alessandro Genovesi.
Il a concocté un récit fin et délicat ; ironique, caustique et tendre.
De prime abord, il apparaît comme désordonné avec sa masse de personnages et leurs multiples interactions. Pourtant, très vite, tout se met en place dans un mélange intelligent de scènes jouées, de monologues et d’apartés avec le public.
Si ce mélange des genres et cette évolution par petites touches offrent une étude approfondie de la psychologie de chacun, elles permettent aussi de varier les tempos et de distiller pas mal d’humour.
Sans grands effets de décors, sans recourir à une pléthore d’accessoires, le spectacle oscille entre émotion et dérision, sans jamais tomber dans le cliché ou dans le kitsch.
Chacun se met à nu et laisse transparaître les névroses, obsessions ou douleurs qui le minent.
Si les traits de caractère apparaissent comme forcés, voire caricaturaux, si l’histoire s’imprègne d’une dose de folie, si tous paraissent dégagés des contingences bassement matérielles telles l’argent, si leur univers semble rose et agréable à vivre, c’est peut-être pour mieux se recentrer sur l’essentiel... les sentiments.
Paradoxalement cette peinture quelque peu surréaliste, cette conception théâtrale légèrement en dehors des normes offre un résultat surprenant et très séduisant.
Si on peut être dérouté les premiers instants, on se laisse ensuite très vite happer par le texte et le jeu varié des comédiens.
Raconter fidèlement le récit serait ou trop long ou risquerait de trop vous en dire, car Happy family est bien plus que la rencontre de deux familles qui se rencontrent à l’occasion du prochain mariage de leurs enfants, bien plus même qu’une saga.
Il y a l’amour et la haine, la vie et la mort, les complexes et les audaces, les non-dits et les grands déballages, la vieillesse et la jeunesse, la tolérance et la révolte, les larmes et le happy end…
Il y a les ambulanciers et le pizzaiolo, l’ex-copine et la grand-mère oublieuse, la mère fêlée et la colérique, l’écrivain et le fumeur de pétard, la pianiste et l’avocat, le berger belge et le labrador…
Happy family c’est cela, un tout complexe, une de ces toiles impressionnistes qui quand on en est proche n’est qu’un amas de petits points de couleurs et qui au fur et à mesure qu’on prend du recul, quand l’aperçoit dans son ensemble devient une peinture magnifique.
Si le résultat est excellent, c’est qu’outre le texte d’ Alessandro Genovesi , c’est aussi le travail de toute une troupe.
La mise en scène de Dominique Pattuelli (qui pour le Festival de Spa interprétait Anna mère tenu normalement par Marie Van R) se veut sans artifices, fluide et légère.
Équilibrée, elle ne crée ni grands rôles ou petites répliques, pas de vedette ou de faire-valoir, chacun des dix comédiens mérite sa part d’applaudissements.
A écouter les commentaires au sortir de la salle, chaque spectateur s’est attaché ou identifié plus à l’un qu’à l’autre, mais de manière très subjective.
Comédie de mœurs piquante et touchante, Happy family mélange habilement les genres pour nous offrir une fable contemporaine légère et captivante, drôle et humaine, surprenante et attachante.
Ne vous laissez donc pas rebuter par les deux heures de spectacle annoncées, elles ont la fraîcheur et le pétillant d’Asti Spumante et la saveur crémeuse et épicée des tagliolinis de Nonna.
Spectacle vu le 14-08-2011
Lieu :
Festival Royal de Spa (Salon Gris)
Une critique signée
Muriel Hublet
Imprimer cette page
Enregistrer cette page sous format PDF