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Un Tango en bord de mer
Un Tango en bord de merBar d’un hôtel de bord de mer, un soir, deux hommes…
Une rencontre fortuite entre deux inconnus ?
Pas vraiment, l’un d’eux a quelque peu forcé la main du hasard pour organiser ces retrouvailles.
Depuis deux ans, Stéphane l’écrivain reconnu (Jean-Pierre Bouvier) et Vincent le rebelle insolent (Frédéric Nyssen) sont séparés.
Ils ont vécu une passion, un amour violent.
La différence d’âge, l’argent, le besoin de liberté, la peur d’écraser l’autre, le sentiment d’étouffer ou d’être opprimé, la crainte d’être mal aimé et mille autres causes ont eu raison de leur couple.
Vincent s’est enfui un beau jour, sans explications.
Ces deux années leur ont laissé du temps pour panser leurs plaies et peut-être de murir.
Cette nuit qui s’ouvre à eux et la vodka qui délie les langues leur permettront de se parler, d’oser se dire les ressentiments accumulés, les griefs amassés.
Ils vont s’avouer sentiment de solitude, jalousie, incompréhension.
Sans concessions, ils vont enfin communiquer, écouter et entendre l’autre.

Parler est un mot faible pour évoquer ces deux fauves tournoyants, agités, vindicatifs, la patte rageuse, l’écume aux lèvres, les dents carnassières, mais qui ne demandent que peu pour devenir des chatons en mal d’amour, ronronnant pour quémander une caresse, une marque d’affection.
Si Philippe Besson, l’auteur, axe son récit sur des amours masculines, cependant, chacun s’y reconnaîtra peu ou prou.
Nous avons tous nos hantises, nos non-dits, nos peurs inavouables, nos secrets, notre besoin d’être aimés ou appréciés.
Tous nous n’osons avouer certaines détresses, acceptons une série d’inconvénients pour  l’amour de l’autre, par peur de lui déplaire, parce que cela lui fait tant plaisir. Un Tango en bord de mer

Pour sa première pièce de théâtre, Philippe Besson nous propose un texte fort, rythmé, prenant et subtil.
Il explore finement la psychologie de ses personnages, met en évidence leurs failles et leurs contrastes.
Avec beaucoup de sobriété et de justesse, la mise en scène de Patrice Kerbrat souligne, amplifie ou accompagne la force ou la tendresse des mots.
La scénographie d’Édouard Laug et les éclairages de Laurent Béal renforcent l’intimité, la chaleur moite et la tension ambiante.
Sur scène,  Jean-Pierre Bouvier et Frédéric Nyssen sont époustouflants.
Leurs différences sont là visibles, perceptibles à l’œil nu tant les deux acteurs sont vrais, authentiques, vibrants, palpables, tangibles dans leurs gestes comme dans leurs paroles ou leurs silences.
Tout en souplesse et en retenue, le premier laisse transparaître une fragilité ambigüe, mâtinée d’un certain sens de la manipulation.
Le second tout en muscle, n’est que tension vigueur et impulsivité, même si sous cette carapace rugueuse, il dissimule un cœur tendre et sensible.
Tango en bord de mer se révèle d’emblée comme un des musts de la saison 2010-2O11.
Fort, subtil et prenant, le spectacle séduira largement tant dans son propos que dans la qualité de son interprétation.
Que les esprits étroits ne se fixent pas sur ces amours entre deux hommes, car ce qui freine leur relation, ce qui en a causé leur rupture est ce qui mine intérieurement chacun d’entre nous : le besoin d’être aimé pour soi-même (et pas pour les apparences que l’on projette) et le d’être reconnu.
À ne pas manquer !

Spectacle vu le 07-08-2010
Lieu : Festival Royal de Spa (Salon Gris)

Une critique signée Muriel Hublet

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