Adultères
Règlements de compte en hauts talons
Avec Adultères, Marcel Delval met en scène deux courtes pièces de Woody Allen.
L’auteur juif new-yorkais excelle dans l’observation de ses contemporains.
Il épingle les travers du couple allant de l’usure du temps et des sentiments aux mesquineries, mensonges et tromperies.
Il situe son action dans un milieu bourgeois conformiste où le sport fétiche semble d’être l’adultère de proximité.
Il est plus facile de chasser dans son voisinage, d’attraper les proies à portée de main plutôt que de se donner la peine de chercher plus loin que le bout de son nez.
Adepte de l’étude psychologique et de la psychanalyse, chacun de ses personnages est, plus ou moins dirons-nous perturbé : maniaco-dépressif, névrotique, femme en recherche d’identité, obsédée du travail, cinquantenaire à la libido ravagée, pudibonde….
Pitoyables, lâches, menteurs et frustrés les héros de Woody Allen frisent souvent le ridicule et sont rarement punis de leur veulerie et de leurs turpitudes.
Dans sa mise en scène, Marcel Delval amplifie ce côté risible pour le porter carrément au niveau du burlesque.
Il pousse les différents protagonistes vers un surjeu volontairement kitch, qui paradoxalement et très habilement fait mieux percevoir les fêlures et les souffrances muettes.
Marcel Delval fait de la première des deux pièces en un acte, Central Park West, un vrai vaudeville.
Il s’est entouré, entre autres, du duo Kumps-Cogniaux qui en manière de ressort tragi-comique, nous démontre une nouvelle fois l’étendue de leurs talents.
Phyllis, une psychanalyste réputée, plus clairvoyante pour aider ses patients que pour voir la réalité de son couple, appelle à l’aide Carol, son amie.
Quasi ivre morte, elle l’accule dans ses derniers retranchements, l’accuse de batifoler avec son époux et est responsable de son divorce imminent.
Et zou, on est parti pour une heure vingt de pur délire.
Cris, injures, chantages, mensonges, aveux, accusations, provocations, menaces de suicide, tout y passe.
Si les premières minutes de confrontation entre les deux femmes sont un peu tendues et transparaissent comme crispées, l’arrivée de Bernard Cogniaux, le mari de Carole, va dynamiser l’ensemble et nous offrir un feu d’artifice de loufoquerie et d’extravagance.
Un régal.
La seconde pièce, Old Saybrook, plus biscornue déjà dans sa thématique, est donc mise en scène d’une manière un chouia plus sobre.
Marcel Delval a choisi ici de laisser agir toute la folie de la situation et de simplement l’amplifier par les tenues kitsch et les comportements volontairement stéréotypés des acteurs.
Marie-Paule Kumps et Bernard Cogniaux explosent littéralement et s’attirent toutes les faveurs du public, au point d’en effacer quasiment la prestation pourtant efficace de leurs partenaires (Joséphine de Renesse, Pierre Dherte, Alicia Frochisse et Valéry Massion).
Cependant, il serait dommage d’omettre la présence d’Hélène Theunissen, un peu réservée peut-être, mais dont le rôle de femme bafouée et théoriquement maîtresse d’elle-même est plus délicat.
Si elle provoque moins d’éclats de rire, force est de reconnaître que son interprétation n’en est pas moins impeccable et juste que celle de Marie-Paule Kumps et Bernard Cogniaux.
Sans se tromper, on peut donc dire que ces Adultères décapants et savoureux marient Woody Allen au Théâtre Varia, pour le meilleur et pour le rire.
Spectacle vu le 08-10-2011
Lieu :
Théâtre Varia - Grande Salle
Une critique signée
Muriel Hublet
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