TRIBUNA(A)L
Création hautement réaliste, Tribuna(a)l reconstitue, scénographie (signée Giovanni Vanhoenacker), costumes, textes, mise en scène à l’appui, l’univers judiciaire.
Tous ceux qui, un jour, se sont aventurés, de gré ou de force, dans un Palais de Justice, reconnaîtront, sans peine, cette espèce de machinerie à déchiqueter l’homme, tant le travail de Jos Verbist et de Raven Ruëll, basé sur des expériences, des mots, des phrases, glanées pendant des séances d’observation, sur base de témoignages d’intervenants est d’une vérité confondante.
Assis sur les rigides banquettes d’une salle d’audience, soigneusement recréée pour l’occasion, accueillis par le policier de service, sous des froids néons de rigueur, les spectateurs sont face à des magistrats quasi authentiques, à des cas vrais, vécus, vraisemblables, si proches des drames qui font le quotidien de nos juges et plaideurs.
De prime abord, certains remettront en cause le terme théâtre pour Tribuna(a)l. Pourtant la Justice n’est-elle pas entourée de rites, de règles, de costumes, de décors, de canevas comme n’importe lequel des spectacles montés sur nos scènes.
La représenter sur les planches, la changer de plateau lui offre un autre éclairage, un autre public.
C’est la vie, pure et dure, avec ses travers, ses égarements, ses erreurs, ses aberrations, ses faiblesses et ses turpides qui s’étale sur le banc des prévenus et dans la bouche des témoins et avocats.
C’est la désillusion, la morale confite et bien-pensante, la société et ses dérives permissives ou répressives (selon que vous soyez …) qui siègent sur le banc de la magistrature.
Pas de jugement, pas de prises de position, simplement le renvoi dos à dos d’un état de fait, d’un pitoyable état des lieux, celui de notre Justice, malade de son engorgement, de ses procédures, de ses vides, de sa lourdeur, de ses incohérences.
Bilingue, en permanence surtitrée, jouée par une cinquantaine d’acteurs et figurants, Tribuna(a)l dresse un bilan interpel
lant, caustique et hélas tristement réaliste des errements de la vielle Dame si lasse, avec ses yeux bandés et son bras engourdi à force d’essayer de maintenir en équilibre les plateaux si disproportionnés d’une balance de plus en plus lourde à soulever.
Un enseignement pertinent pour tout qui n’a jamais levé un coin du voile de la Justice.
Spectacle vu le 22-03-2013
Lieu :
Théâtre National - Grande Salle
Une critique signée
Muriel Hublet
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